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Texte de Louis Doucet

Vice-Président de MAC2000 et collectionneur

 

Olivier Pardini peint en noir et blanc à partir de photographies. Quand des couleurs apparaissent, toujours parcimonieusement, elles le font comme celles des tirages d’autrefois, partiellement colorisés à l’encre, à la gouache ou à l’aquarelle. 
Il écrit : « Comme beaucoup, j’ai grandi dans un univers d’images. Fixes ou animées, d’actualité, de divertissement, publicitaire ou de famille, les reproduire manuellement a toujours été pour moi une tentative d’appropriation et de transmission ».

Olivier Pardini collecte des images diffusées par des particuliers sur Instagram et les regroupe par thème. Il les reproduit ensuite à l’huile, sur toile, avec le plus grand réalisme possible, après les avoir recadrées au format carré, comme s’il s’agissait de clichés Polaroid. Il les présente ensuite par groupes de neuf, à la façon d’une mosaïque. Répétitions et variations – au sens musical de ce terme – qui n’arrivent pas à épuiser le sujet. Les titres des pièces résultantes portent le hashtag qui rappelle leur origine. Ainsi, les séries Variations sur #collarbones s’intéressent aux photographies de clavicules de jeunes femmes dénudées postées sur le net.

Il y a, évidemment, comme chez tout collectionneur, de l’obsessionnel dans la démarche d’Olivier Pardini. Mais il y a bien plus. Au-delà de cet exercice qui pourrait paraître gratuit et dérisoire, l’artiste nous invite à réfléchir à la civilisation du selfie, à ce culte de l’apparence physique, aux motivations qui portent un grand nombre de personnes à livrer à un public anonyme leur représentation corporelle, à se mettre en scène pour des spectateurs inconnus.

Texte d’Emma Nubel

Journaliste et blogueuse - www.emma-nubel.com

 

Répéter encore et encore le même thème presque obsessionnellement comme si le sujet ne s’épuisait pas. Variations infimes mais duplications inlassables.L’artiste Olivier Pardini prend des images qu’il trouve sur Instagram, se les approprie, les remanie mais surtout les copie à la perfection.

En tombant dans l’illusion facile de photographies en noir et blanc, on ne fait que s’enfoncer dans le miroir tendu devant nos yeux. Société narcissique, regard presque voyeuriste. Olivier Pardini questionne les motivations de cette envie de se dévoiler à un public anonyme. Ce culte du selfie semble rebondir à la surface de cette toile, nous exhibant la vénération de l’apparence.

Tout n’est que beauté extérieure, représentation idéalisée et normes respectées. Toutes différentes et pourtant non différentiables, ces jeunes femmes fusionnent pour ne former qu’une masse brouillée de lumières et d’ombres mais surtout de sensualité évanescente. Des épaules dénudées, une bouche pulpeuse, un cadrage similaire et des ombres profondes qui s’enfoncent dans le sillage de ces corps langoureux modèlent ces neuf tableaux.

L’oeuvre parait être une mosaïque auquelle pourrait s’ajouter à l’infini des images qui s’assemblent mais surtout se ressemblent. Des choix s’opèrent, un tri des photographies s’effectue. Rapide et vif, l’oeil contemple chaque tableau, essayant de repérer les minimes variations. De plus, le hashtag rappelle l’origine et le lieu où les images ont été trouvées, tout comme le format carré qui fait écho au Polaroïd mais surtout à Instagram.

 

Reproduire à l’identique pour mieux se les approprier et transmettre. Cela peut sembler quelque peu paradoxale. Comment montrer sa personnalité artistique quand on chaparde des images au vue de tous ? Ces peintures semblent trop réelles ; la sensualité jaillit de la touche douceureuse tout en s’échappant d’une bouche entrouverte. Ce clair-obscur violent effleure le grain de la peau pour faire ressortir la délicatesse du geste. Anonymat réciproque, on ne connait pas ces jeunes filles et elles ne sauront jamais qui contemple ces peintures hyperréalistes de leurs photos.

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